15 - 05
2008
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Ca démarre fort pour ce second jour du festival avec deux films en compétition qui devraient marquer les esprits, deux films superbes très différents mais avec un point commun : l'amnésie : elle a oublié les circonstances du meurtre de son amant dont elle est accusée ("Leonora"), il a oublié qu'il a participé au massacre de Sabra et Chatila au Liban ("Waltz with Bachir")... Les deux films que j'ai vu en séance officielle en présence des réalisateurs ont été longuement applaudis, on n'était pas loin de l'ovation... Une reconnaissance immédiate bien méritée qui fait craindre que, statistiquement parlant, on n'ait pas demain la veille une autre journée avec deux films en compétition aussi choc!
Pourtant, pour la séance de 22h "Waltz with Bachir", on traînait les pieds, les invit pleuvaient, pire, on vous les proposait, même pas la peine de demander, d'ailleurs, la salle n'était pas pleine. Les festivaliers ayant sans doute préféré le spectacle d'Angelina Jolie à Cannes, voix dans un film d'animation "Kung Fu Panda" projeté hors compétition à 19h30... Il faut dire aussi qu'à la même heure, 22h, la section Un Certain regard, mitoyenne du palais, passait un film très tendance "Tokyo", trois visions de la ville par trois cinéastes dont Leos Carax, enfin de retour.
Pourtant, pour la séance de 22h "Waltz with Bachir", on traînait les pieds, les invit pleuvaient, pire, on vous les proposait, même pas la peine de demander, d'ailleurs, la salle n'était pas pleine. Les festivaliers ayant sans doute préféré le spectacle d'Angelina Jolie à Cannes, voix dans un film d'animation "Kung Fu Panda" projeté hors compétition à 19h30... Il faut dire aussi qu'à la même heure, 22h, la section Un Certain regard, mitoyenne du palais, passait un film très tendance "Tokyo", trois visions de la ville par trois cinéastes dont Leos Carax, enfin de retour.
"Leonera" ("Lion's den") de Pablo Trapero / Argentine
sortie 3 décembre 2008
sortie 3 décembre 2008
Produit par le beau réalisateur brésilien Walter Salles qui sera lui-même en compétition samedi avec "Linha de passe", la projection du film fut un franc succès. Ce portrait de femme résiliente et mère tigresse a séduit et bouleversé les festivaliers. Julia se réveille dans le sang, son appartement dévasté, deux hommes nus sauvagement poignardés gisant sur le sol, l'un d'eux est son compagnon, l'autre est sans doute l'amant de ce dernier... Maquillée outrageusement, le cheveu décoloré jaune, les ongles vernis rouge sang, Julia, bientôt arrêtée par la police, a oublié ce qui s'est passé. L'un des hommes est mort, l'autre pas et va témoigner contre elle.
Julia est alors incarcérée dans le quartier des femmes mères car elle est enceinte. Panoramique sur les ventres des femmes sur le pas de leurs cellules ouvertes avec des enfants en bas âge, moins de quatre ans, ensuite, l'administration retire la garde des enfants aux détenues. Beaucoup de plans panoramiques dans ce film et des conversations finissant hors champ en voix off pendant que l'action se poursuit ailleurs, c'est style du réalisateur, rapide mais fluide, sur le fond, réaliste à la limite du naturalisme mais humain, humaniste.
Dans la prison, un vie neo-familiale s'organise, Julia partage l'intimité de sa voisine codétenue avec qui elle vit quasiment en couple, Marta allaite Tomas, le bébé de Julia qui lave son linge en retour, aux services mutuels rendus se substitue de l'affection, une forme d'amour, un univers matriarcal où on a appris à se passer des hommes, hormis le "détail" de fécondation.Pourtant, on colle de près à la réalité de la prison, les fouilles, les insultes entre détenues, les deals, le lesbianisme toléré par les matonnes. De la lumière du jour, on ne voit que les plans de l'extérieur de la prison, à l'intérieur, c'est sombre, crade, vétuste, bruyant et bordélique. Marta libérée, Julia est fragilisée, c'est le moment que choisit sa mère, revenue de France où elle habite, femme égoïste et mère indigne, ayant abandonné sa fille enfant, pour lui enlever le petit Tomas et en prendre officiellement la garde.
Dans la prison, un vie neo-familiale s'organise, Julia partage l'intimité de sa voisine codétenue avec qui elle vit quasiment en couple, Marta allaite Tomas, le bébé de Julia qui lave son linge en retour, aux services mutuels rendus se substitue de l'affection, une forme d'amour, un univers matriarcal où on a appris à se passer des hommes, hormis le "détail" de fécondation.Pourtant, on colle de près à la réalité de la prison, les fouilles, les insultes entre détenues, les deals, le lesbianisme toléré par les matonnes. De la lumière du jour, on ne voit que les plans de l'extérieur de la prison, à l'intérieur, c'est sombre, crade, vétuste, bruyant et bordélique. Marta libérée, Julia est fragilisée, c'est le moment que choisit sa mère, revenue de France où elle habite, femme égoïste et mère indigne, ayant abandonné sa fille enfant, pour lui enlever le petit Tomas et en prendre officiellement la garde.
Un film qui traite davantage de l'organisation de la survie dans des conditions hostiles, voire épouvantables, que de l'univers carcéral pris ici comme exemple. On voit le personnage de Julia évoluer, de blonde autrefois à brune ensuite, les cheveux de plus en plus raccourcis, démaquillée, naturelle, le nom de son fils tatoué sur le bras. Alors que Julia étudiante était plus ou moins exploitée par deux hommes, en prison, elle grandit, retrouve paradoxalement le respect de soi tout en apprenant la solidarité de la part de femmes parias qu'elle n'aurait pas regardées dans son ancienne vie. Portrait de femme, oui, mais surtout leçon de (sur)vie. Un film qui devrait cartonner, comme on dit, et plaire à la fois aux cinéphiles et au grand public, une denrée rare...
tapis story...
Eva Longoria, après la robe bleue, la blanche..., photo L'Oréal Cannes
"Waltz with Bashir" d'Ari Folman / Israël
Tant de beauté pour tant d'horreur... C'est ainsi qu'on pourrait résumer l'impression que laisse ce film énergique et sensuel, parfois poétique, avec un habile crescendo de l'horreur jusqu'au souvenir final du massacre des camps palestiniens de Sabra et Chatila au Liban en 1992 par les milices chrétiennes phalangistes, alliées d'Israël, après l'assassinat du président Bachir Gemayel, d'où le titre du film.
Le réalisateur de films Ari Folman se souvient qu'il a tout oublié de la guerre à l'occasion d'une conversation avec un ami qui fait un cauchemar récurrent depuis deux ans : une meute de 26 chiens le poursuit pour le dévorer, quand il se souvient que 20 ans auparavant, il était chargé de tuer les chiens de garde pendant la première guerre du Liban. A la recherche des compagnons d'arme du passé qui pourraient témoigner qu'il se trouvait avec eux pendant la guerre du Liban, Ari retrouve un seul souvenir, des soldats sortant nus de la mer la nuit, des hommes jeunes et beaux sous la lune qui enfilent leurs uniformes sur la plage, quand le jour se lève, l'image pâlit, ils sont devenus des soldats, scène récurrente dans le film où figure un autre ami installé aujourd'hui en Hollande. Ce dernier qu'Ari va voir à Amsterdam se souvient des combats mais nie appartenir à la scène...
Le réalisateur de films Ari Folman se souvient qu'il a tout oublié de la guerre à l'occasion d'une conversation avec un ami qui fait un cauchemar récurrent depuis deux ans : une meute de 26 chiens le poursuit pour le dévorer, quand il se souvient que 20 ans auparavant, il était chargé de tuer les chiens de garde pendant la première guerre du Liban. A la recherche des compagnons d'arme du passé qui pourraient témoigner qu'il se trouvait avec eux pendant la guerre du Liban, Ari retrouve un seul souvenir, des soldats sortant nus de la mer la nuit, des hommes jeunes et beaux sous la lune qui enfilent leurs uniformes sur la plage, quand le jour se lève, l'image pâlit, ils sont devenus des soldats, scène récurrente dans le film où figure un autre ami installé aujourd'hui en Hollande. Ce dernier qu'Ari va voir à Amsterdam se souvient des combats mais nie appartenir à la scène...
Film sur la mémoire, l'amnésie partielle ou totale, les petits et les grands arrangements avec la mémoire individuelle et collective. Film sur la culpabilité du vivant qui enterre ses compagnons morts, du soldat israëlien, coupable de s'imaginer prendre la place du nazi, le massacre des palestiniens occultant le génocide de sa famille déportée à Auschwitz. Le film d'animation permet de montrer l'immontrable, de démontrer la mécanisation des tueries, il faut tirer, les soldats sont envoyés sur place pour ça, les départs sont comme des vacances, on danse, on fait la fête sur le bateau... Une scène empreinte d'une poésie tragique montre le soldat Ari rêvant à une femme, petit personnage bleu sur le ventre d'une femme géante bleue, puis, l'image devient orangée tandis qu'on fait sauter le bateau en flammes, ses compagnons tués. La grande force du film, c'est d'avoir obtenu l'impossible équilibre entre la beauté des images et l'horreur du sujet traité, une sorte de sensualité indécente des soldats, voire de l'idée du combat, se confrontant à la réalité : les atrocités allant jusqu'au massacre final. Sur une BO force éclectique avec l'insertion de morceaux de musique classique pendant les fusillades, dont une valse (de Chopin, je crois), en référence aux nazis qui aimaient la musique? La scène finale est d'une féroce sobriété, une douche glacée. Dix mille pieds au dessus de "Persepolis" pour ceux qui prédisaient que ce film serait une version bis 2008.
Mots-clés : Cannes 2008, Waltz with Bachir, Ari Folman, Leonera, Pablo Trapero
Commentaires
Le Festival non stop grâce à vous
Je vois que vous êtes en plein travail et je prends connaissance de vos articles avec le plus vif intérêt. J'espère que vous avez pu trouver un gîte sympa. Bonne continuation. On se sent presque à vos côtés dans le festival tant vous nous le racontez de façon vivante. N'oubliez pas tout de même de dormir un peu... ARMELLE
Armelle B. - 15.05.08 à 11:53 - # - Répondre -
"Waltz with Bachir" : mémoire collective
Taureau blanc
Splendeur indicible
Effacée
À la page du livre,
Glaise maléfique
D’une créature
Sans âme,
Démence purpurine
Dans des viscères chauds,
Au pied d’un cèdre
La hache de brèche
Achève
Le taureau blanc.
Sabra et Chatila, 14 septembre 1982, Liban.
(© 2007 Anick Roschi )
Extrait du livre "Le voyage des ombres" Edition Du Cygne
anick roschi - 23.05.08 à 15:24 - # - Répondre -
Waltz with Bachir: quand la bande dessinée???
Je peux en parler de ce film, car j'y étais. C'était mon premier film , le premier que j'allais visionner, de ma vie, dans cette salle mythique, la salle du 61 ème festival du film de Cannes.
Bon moi, je n'ai que 43 ans, mais j'ai rêvé comme bon nombre d'entre nous de venir un jour à cannes, j'ai commencé cette envie quand j'ai eu 19 ans, j'habitais à paris et je me tapais tous les films que je pouvais , pour comprendre le cinéma, moi le petit provincial nantais monté à Paris pour faire ses études, en réalité celles de la vie.... alors avec ma carte d'étudiant, je pouvais aller au cinéma pour moins cher.
8 et demi, fellini, la cité des femmes, subway de Luc Besson christophe Lambert, en jaune décoloré, Bagdad café, pendant " 3 ans, j'en ai vu des films..... des fims .... la culture.....je me régalai souvent seul , parfois avec des copains, un copain, rarement une copine , et puis un cousin dans l'audiovisuel, je dirais même deux cousins dans le cinéma, leur papa était chef op pour lautner alors .... mais bon eux ils y étaient dans le cinéma pas moi !!!!!
Bref, Walz with Bachir, j'ai adoré, je ne me suis pas ennuyé une seule seconde , et je dis mille fois bravo ce livre sur la mémoire , sur ses mécanismes internes, sur l'explication technique de la mémoire, sur son explication scientifique à base de dessins faut quand m^eme le faire me direz vous non??
montrons çà dans une classe de gamins de _8-14 ans et plus besoin de leur expliquer le mécanisme de la mémoire, ce film je l'aime , je l'ai vraiment aimé car il se regarde comme un livre il y a du rêve, de la poésie, de la peinture, du dessin et ils sont tellement bien réalisés ces personnages , que tranquillement on les tourne un par un, un après l'autre, avec ravissement, émerveillement, comme une bande dessinée comme un livre de poésie!!!!!!!!
Un régal bon appétit allez le voir, il en vaut la peine c'est un chef d'oeuvre!!!!!
karl
karl schonborn - 29.05.08 à 19:40 - # - Répondre -
← Waltz with Bachir : le meilleur!
Bonjour! Pour une première fois à Cannes, vous avez eu le meilleur film!!! Il sort le 25 juin en salles et je pense que l'injustice qu'il n'ait pas eu de prix à Cannes va être réparée car il va sûrement avoir du succès. Moi aussi, j'en ai vu des films depuis la nuit de temps, déjà quand j'étais en pension en province..., le vendredi soir, une cousine m'emmenait au cinéma, c'était un rituel... Les DVD, ça a changé beaucoup de choses mais ce n'est pas la même magie, Cannes avec la musique du carnaval des animaux avant chaque projection... Bon WE!
vierasouto - 30.05.08 à 08:08 - # - Répondre -